10 annonces d’Alexandre Bompard résumant le plan Carrefour 2026
Par Clotilde Chenevoy | Le | Enseignes
Alexandre Bompard a dévoilé ce matin son plan Carrefour 2026. Le p-dg a dévoilé une série de projets qui viennent transformer un peu plus le groupe. Résumé en 10 citations des annonces phares.
C’est à Massy, dans un amphithéâtre du siège, qu’Alexandre Bompard a présenté son plan Carrefour 2026. Le p-dg a eu une attitude et un discours résolument conquérant : « En 2018, alors que l’économie était en croissance, Carrefour était à la peine. Aujourd’hui, Carrefour est bien mieux armé pour aborder l’avenir. » Le dirigeant est revenu sur les cessions des pays, nécessaires selon lui et qui permettent de recentrer le groupe sur l’Europe et l’Amérique Latine. « Dans ces deux zones, nous enregistrons des gains continus de parts de marché », pointe-t-il
Il a aussi insisté sur les deux piliers qui soutiennent sa stratégie et qui ont été mis en place avec le plan Carrefour 2022 : sa raison d’être, la transition alimentaire pour tous, et son modèle, être une Digital Retail Company. Pour les prochaines années, le groupe avancera toujours avec ces deux éléments et s’engage fortement, notamment en termes de RSE. Voici les annonces phares à retenir en 10 citations, qui s’accompagnent de nouveaux capex, allant de 1,7 milliards d’euros à 2,0 milliards d’euros par an.
1/ « Nous sommes en train de changer radicalement le modèle de Carrefour, par notre marque propre. »
Carrefour veut doper ses marques propres, Alexandre Bompard vantant un positionnement similaire aux marques premiums mais avec un prix inférieur. Il cite ainsi la nouvelle marque Simpl dont l’indice prix est de 5 points inférieur en moyenne aux prix des hard discounters. L’objectif est d’atteindre 40 % du chiffre d’affaires en 2026 contre 33 % en 2022. Le boom des MDD se fera également sur le non-alimentaire. « C’est une rupture majeure, estime le p-dg. Cela veut dire qu’1 produit alimentaire sur 2 que nous vendrons sera de marque Carrefour. »
Ce positionnement répond aussi à la situation inflationniste. Le distributeur a d’ailleurs installé sur son site e-commerce un bouton anti-inflation. Ainsi, grâce à la data, le client se verra proposer des produits équivalents et moins chers. Reste en revanche à convaincre les clients de ce positionnement sur le prix. La bataille est déjà rude sur le sujet… et le podium déjà bien trusté par Lidl et E.Leclerc.
2/ « Nous allons demander à nos 100 plus grands fournisseurs de respecter une trajectoire 1,5 degrés d’ici à 2026. A défaut, ils seront déréférencés. »
L’engagement est fort. Carrefour est engagé dans la trajectoire 1,5 degrés et multiplie les actions pour améliorer son empreinte carbone. Alexandre Bompard veut d’ailleurs que le groupe devienne le leader de l’économie circulaire, « en valorisant 100 % des déchets de nos magasins et en utilisant 100 % d’emballages réutilisables ou recyclables pour notre marque propre dès 2025, ce qui signifie que nous n’ajouterons plus de nouveau plastique ». De plus, le retailer annonce atteindre la neutralité carbone dans ses magasins en 2040, et en e-commerce dès 2030.
Mais le dirigeant veut aussi que les fournisseurs suivent. Et pour cela, il attend qu’eux aussi s’engagent sur la même démarche d’ici 2026, au risque sinon d’être déréférencé. « Actuellement, 27 % le sont, a précisé Carine Kraus, directrice exécutive de l’engagement. Chaque année, nous irons voir s’ils suivent ou non cette trajectoire 1,5°. Nous ne ferons pas d’audit, ce n’est pas notre compétence. Les entreprises engagées dans cette démarche font appel à des organismes tiers pour la valider. Nous publierons ainsi tous les ans le taux de progression de nos fournisseurs du Top 100 engagés dans cette démarche. »
3/ « Nous lancerons un nouveau magasin de centre-ville, Potager City. »
Carrefour lance une nouvelle enseigne urbaine : Potager City. Le distributeur a racheté la start-up en 2020. Elle est spécialisée dans la livraison par abonnement et en ligne de paniers de fruits et légumes extra-frais et de saison issus des circuits courts. Les trois premiers magasins, de 100m² environ, ouvriront en Ile-de-France en 2023.
On peut s’interroger sur la pérennité du concept car là encore l’offre est déjà riche. Mais Carrefour compte sur l’apport du digital pour proposer des formats différents et l’abonnement est un nouveau modèle de fidélisation. Alexandre Bompard a d’ailleurs annoncé qu’il confirmait son objectif d’atteindre 30 % de clients omnicanaux d’ici 2026 car un consommateur qui devient omnicanal augmente ses dépenses de 22 % dès la première année.
Quant aux circuits courts, le groupe compte pivoter son sourcing pour les développer. Le dirigeant a annoncé vouloir multiplier par deux le volume des fruits et légumes issus de productions situées à moins de 50 km des magasins.
4/ « L’hypermarché est un rempart contre l’inflation, à condition qu’il assume toute sa vocation populaire, et son rôle de premier format discount. »
Pour Alexandre Bompard, l’hypermarché a encore toute sa place dans la consommation des Français mais le modèle doit quelque peu évoluer pour améliorer sa rentabilité et son attrait aux yeux des clients. Le dirigeant importe la méthode qui a fait ses preuves en Amérique Latine : la méthode Maxi.
Celle-ci vient améliorer l’efficacité opérationnelle à tous les niveaux pour aller à l’essentiel et une valorisation plus importante des premiers prix, en alimentaire et non alimentaire. Au-delà de la proposition de petits prix ou de gros conditionnements, Carrefour compte supprimer 40 % de ses références permanentes en non-alimentaire, et 20 % en alimentaire. « Cette méthode fonctionne, et nous la déploierons dans tous nos magasins, en hypermarché, mais aussi en supermarché », a indiqué le dirigeant.
5/ « Avec Publicis, nous créons une alliance qui va nous permettre de changer d’échelle et de géographie. »
C’est l’une des plus grosses annonces de ce plan de conquête. Carrefour veut aller plus loin sur l’exploitation de ses données avec le retail media. L’objectif est de devenir une plateforme de services médias, qui va bien au-delà du distributeur. Le groupe a créé Carrefour Links en juin 2021 et désormais il va plus loin en créant une filiale commune avec Publicis en 2023. Elle sera détenue majoritairement par Carrefour. Cette opération va mettre fin aux partenariats en cours avec Criteo et Liveramp, le retailer veut se développer en Europe Continentale et en Amérique Latine.
« Nous voulons remonter la chaîne de valeur, a détaillé Elodie Perthuisot, directrice executive e-commerce, data et transformation digitale du groupe, c’est à dire être capable à partir de notre expertise et à partir de celle du groupe Publicis de vendre des solutions à d’autres distributeurs, et même au-delà de la distribution à d’autres sites d’autres plateformes. Le sujet c’est d’être capable d’émerger face à Amazon. »
6/ « Nous allons importer Atacadao en France. »
Sur la notion de prix, Carrefour veut accélérer sur le discount et le retailer vient d’annoncer qu’il importe en France Atacadao, son magasin cash and carry qui cartonne au Brésil. « C’est un vrai outil de conquête pour notre Groupe », assure le dirigeant. L’expansion va d’ailleurs continuer en Amérique du Sud et il faudra attendre l’automne 2023 pour l’inauguration du premier en France.
En revanche, pourquoi dégainer Atacadao alors que Supeco est déjà présent en France ? Interrogé sur le sujet, Alexandre Bompard a botté en touche, pointant que Supéco rencontre un vrai succès, notamment en Espagne, et que l’enseigne va continuer à se développer.
7/ « Nous deviendrons un grand producteur d’énergie solaire »
Carrefour se diversifie de plus en plus. Et après le retail media, c’est dans l’énergie que le groupe veut se développer. Un pari qu’avait fait il y a des années Jean-Charles Naouri avec GreenYellow. Le dirigeant a dû céder récemment l’entreprise pour récupérer du cash.
Côté Carrefour, des investissements de 800 millions d’euros seront faits pour réduire la consommation d’énergie du groupe, de l’ordre 20 % d’ici 2026, et dès 2024 en France. Mais ces sommes serviront aussi à produire pour les autres. Alexandre Bompard annonce qu’avec un parking sur 2 équipé d’ombrières, le groupe aura une surface totale de 4,5 millions de m² de panneaux photovoltaïques. « Cela nous permettra de produire 1 terawatt-heure d’énergie renouvelable par an, soit la consommation d’une ville de 450 000 habitants, chiffre le dirigeant. Nous sommes en train de consulter les acteurs du marché pour définir les modalités de développement de cette activité. Et nous commencerons les installations avant la fin de l’année prochaine. »
8/ « Lancement de 100 opérations de mixité urbaine d’ici 2026 en France, en créant 25 000 logements, mais aussi des espaces de loisirs, et des bureaux. »
Après l’énergie, c’est dans l’immobilier que Carrefour compte avancer ses pions. Le groupe a des actifs qu’il entend valoriser différemment. Il n’est pas question de metavers, mais de 1,5 millions de m² qui permettront de créer 500 millions d’euros de valeur d’ici 2030. Au total, 100 opérations de mixité urbaine seront réalisées d’ici 2026 en France, incluant la création de 25 000 logements, d’espaces de loisirs, et de bureaux. Une consultation sera prochainement organisée pour choisir des co-promoteurs. Au Brésil, l’ambition est encore plus forte : « nous créerons la plus grande foncière privée d’Amérique du sud, promet Alexandre Bompard. En ouvrant le capital à des partenaires immobiliers minoritaires, ce projet va nous permettre de saisir des opportunités de cristallisation de valeur, avec 1,5 milliards de réal de loyers perçus par notre foncière. »
9/ « Carrefour a besoin d’un choc de simplification. »
C’est l’un des volets du précédent plan qu’Alexandre Bompard estime n’a pas réussi. Le sujet de la simplification revient donc sur le devant de la scène, au niveau des achats et aussi des équipes métiers. « Tous nos grands fournisseurs internationaux passeront par notre unique centrale européenne d’achat, Eureca, a annoncé le dirigeant. Notre offre non-alimentaire aussi sera centralisée et européenne. »
Carrefour va mutualiser ses achats au niveau mondial et va dégraisser dans ses sièges sociaux pour créer des pôles d’expertise à l’échelle du groupe.
Au-delà des achats, ce sont aussi les équipes au niveau des différents sièges qui vont évoluer. Carrefour veut créer des pôles d’expertise et non plus dupliquer une même organisation par pays. Comme pour les achats, l’idée est de mutualiser les compétences sur la tech, la data, la marque, l’immobilier, ou encore certaines fonctions financières. « Cette nouvelle organisation renforcera la compétitivité de tous nos pays, notamment les 18 plus petits, qui réduiront leurs coûts de sièges, et surtout bénéficieront d’une expertise bien plus riche à l’échelle du groupe, ce qui est un atout face à leurs concurrents locaux », a insisté Alexandre Bompard.
Concrètement, cela signifie que des réductions d’effectifs sont à prévoir… Des discussions avec les partenaires sociaux doivent intervenir. Côté budget, ce choix d’organisation et la mutualisation des achats doivent permettre au groupe de réaliser d’ici 4 ans 4 milliards d’euros d’économie. Sachant que depuis 2022, il en a déjà réalisé 8 milliards.
10/ « Le Groupe de demain, nous l’inventerons avec nos franchisés. »
Dans le plan Carrefour 2022, Carrefour a décidé de développer la franchise, basculant des magasins en location-gérance. Le modèle fait recette, avec un retour de la rentabilité pour des points de vente qui ont été déficitaires depuis des années.
Le retailer veut donc maintenir ce développement sur toutes ses géographies. « La franchise a représenté 90 % de nos ouvertures de magasins en Europe, a précisé le dirigeant. Nous garderons ce modèle d’expansion, ainsi qu’à l’international, où nous nous développerons dans 10 nouveaux territoires d’ici 2026, en priorité en Amérique latine, en Afrique et au Moyen-Orient. »