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Cdiscount et l’IA générative : chatbot, search, service client… une transformation à grande échelle


Chez Cdiscount, l’intelligence artificielle structure toute la relation client : 520 000 conversations annuelles par chatbot, 17 millions de fiches produits enrichies, 3 millions d’appels/an en baisse… Mélanie Denis, directrice marketing et client, détaille cette mutation portée par l’IA générative.

 L’IA générative redéfinit la relation client à grande échelle de Cdiscount. - © D.R.
L’IA générative redéfinit la relation client à grande échelle de Cdiscount. - © D.R.

Chez Cdiscount, l’intelligence artificielle n’est « pas un effet de mode ni un gadget expérimental ». Cela fait déjà une dizaine d’années qu’elle enrichit le site e-commerce, avec un objectif constant : optimiser l’expérience client à grande échelle. Mais l’arrivée de l’IA générative en 2020 a marqué un tournant décisif. L’e-commerçant français a alors repensé sa stratégie autour de trois piliers : les produits, les collaborateurs, et la relation client. «  Structurellement, notre modèle repose sur la donnée. Avec plus de 20 millions d’offres proposées sur notre site et 19 millions de visiteurs uniques par mois, nous avons besoin d’outils puissants pour faire le lien entre chaque besoin et la bonne solution  », explique Mélanie Denis, directrice marketing et client chez Cdiscount.

Concrètement, dès qu’un internaute arrive sur le site, il croise déjà, sans le savoir, des dizaines d’algorithmes qui analysent sa navigation pour lui recommander les bons produits. Mais avec l’IA générative, l’enjeu s’élargit : il ne s’agit plus seulement de personnaliser, mais aussi d’autonomiser, d’anticiper et de fluidifier l’ensemble du parcours client.

Un chatbot disponible 24h/24… et pertinent dans les 2/3 des cas

Le premier champ d’application majeur a été celui du chatbot, historiquement animé par des conseillers humains et réservé à quelques catégories de produits. Depuis deux ans, Cdiscount a transformé ce dispositif en intégrant une couche d’IA générative, qui prend désormais en charge les premiers niveaux de réponse, tandis qu’un conseiller humain intervient uniquement si nécessaire. «  À l’origine, nous avions un chat géré uniquement par des conseillers humains, limité à certaines catégories de produits et à des plages horaires précises. Désormais, grâce à l’IA, nous assurons un service en continu, 24h/24 et 7j/7, avec un haut niveau de satisfaction   », explique Mélanie Denis.

Aujourd’hui, ce sont 520 000 conversations par an qui transitent par le chatbot. Dans deux tiers des cas, l’IA générative parvient à répondre seule aux demandes des clients. «  Nous avons testé différentes configurations. C’est le mix IA + humain qui obtient les meilleurs résultats, avec un taux de satisfaction qui dépasse les 70  %  », souligne-t-elle.

Un déploiement progressif mais stratégique

Le fonctionnement est simple et transparent. Lorsqu’un client navigue sur une fiche produit, le chatbot est activé. L’IA générative répond dans un premier temps, en s’appuyant sur les informations strictement disponibles dans la fiche. «  Si un client demande combien de ports USB contient un ordinateur, l’IA peut lui répondre immédiatement. En revanche, s’il hésite entre deux modèles, alors un conseiller humain prend le relais. L’approche hybride permet d’optimiser chaque interaction, en réservant l’humain aux échanges à plus forte valeur ajoutée », précise la directrice.

Ce déploiement a permis d’élargir considérablement le champ d’action du chatbot, désormais actif sur l’ensemble du site et accessible à tous les clients, à toute heure.

L’un des bénéfices majeurs de cette approche hybride est l’élargissement du périmètre de service. «  Avant, on ne pouvait activer le chat que sur certains produits, et uniquement pendant les heures ouvrées. Aujourd’hui, il est accessible à tous les clients et sur l’ensemble du site. C’est une vraie avancée en termes d’accessibilité et de continuité de service.  »

Une IA également au service du back-office

Cdiscount a également déployé l’IA générative dans son espace client, notamment pour gérer les demandes liées au suivi de commande, aux retours ou aux réclamations. «   Ici encore, l’objectif est clair : traiter les cas simples de façon autonome, tout en mobilisant les conseillers sur les situations complexes.   » Mais l’apport de l’IA ne s’arrête pas à l’automatisation des réponses. Grâce à des outils de speech analytics, l’e-commerçant analyse désormais en temps réel les appels téléphoniques. Les conversations sont transcrites, évaluées et notées. «  On est capable de mesurer l’évolution du niveau de satisfaction tout au long d’un appel , observe-t-elle. Ce qui, auparavant, nécessitait des écoutes ponctuelles, peut désormais être fait à l’échelle de millions d’échanges.  »

Ce système permet aussi de détecter des signaux faibles (blancs prolongés, tensions verbales…), d’identifier des appels conflictuels, ou encore de s’assurer du respect des chartes d’appel internes. «  On fonctionne avec une logique de scoring. On part de 100 points et chaque incident ou dérapage fait baisser la note. Cela nous donne une vision claire, massive et objective de la qualité de service rendue.  »

Des conseillers assistés par l’IA

Autre usage de l’IA générative  : l’aide à la réponse écrite. Dans les échanges par chat ou sur les réseaux sociaux, les conseillers disposent de suggestions automatiques, adaptées à la tonalité de l’échange et au contexte. «  C’est un véritable gain de confort pour les équipes. Les suggestions s’adaptent non seulement à notre ligne éditoriale mais aussi à la dynamique propre à chaque conversation.  »

À terme, Cdiscount prévoit d’étendre ce type d’assistance aux appels téléphoniques, afin de détecter les signes de frustration en temps réel et de proposer des éléments de langage adaptés aux conseillers.

Une IA générative au service des vendeurs tiers

En tant que marketplace, Cdiscount héberge des vendeurs tiers, dont certains assurent eux-mêmes le service après-vente. Là encore, l’IA générative joue un rôle clé. Elle est capable d’analyser les conversations entre vendeurs et clients, de les résumer, et d’identifier les situations à risque.

Un projet pilote est en cours pour évaluer la qualité du service client des vendeurs à partir de plusieurs critères : clarté des réponses, respect des délais, politesse, pertinence des propositions.

«  Notre objectif est de détecter les litiges potentiels avant qu’ils ne deviennent des problèmes. Nous avons mis en place un projet pilote pour évaluer automatiquement la qualité du service client des vendeurs, à partir d’indicateurs précis  », détaille Mélanie Denis. L’IA peut même juger du « tone of voice », ton d’un vendeur, de la clarté de ses réponses ou du respect des standards de la place de marché. «  Notre objectif est d’intervenir avant qu’une situation ne dégénère. Aujourd’hui, pour qu’on s’en mêle, il faut souvent que le client nous sollicite. Demain, nous voulons pouvoir détecter automatiquement les situations à risque  », ambitionne Mélanie Denis.

À terme, Cdiscount souhaite fournir à ses vendeurs des recommandations personnalisées pour améliorer leur relation client. «  L’IA nous aide à aller au-delà du traitement unitaire. On commence à structurer des boucles de retour qui nourrissent toute notre chaîne de valeur.  »

Des impacts mesurables sur la performance globale

Les résultats sont là. En six ans, le nombre d’appels téléphoniques a été divisé par deux à trois, passant aujourd’hui à environ 3 millions par an. «  C’est le résultat combiné d’une meilleure expérience client, d’une amélioration des process logistiques et d’un espace client de plus en plus autonome  », explique la directrice marketing.

Moins de problèmes, plus d’autonomie, et une meilleure orientation des cas complexes  : telle est la promesse voulue. «  Notre but n’est pas de remplacer l’humain, mais de le remettre là où il a le plus de valeur. L’IA est un accélérateur, pas une finalité.  »

Le search, un autre champ d’excellence

Loin de se limiter au service client, l’IA générative est aussi exploitée sur un champ stratégique : le moteur de recherche. Avec un milliard de requêtes par an, dont la moitié sont tapées une seule fois, Cdiscount devait trouver une solution à la faible pertinence des requêtes longues ou peu fréquentes. «  Un moteur de recherche classique fonctionne bien sur les requêtes fréquentes, mais il est inefficace sur la long tail. Grâce à l’IA générative, on parvient à catégoriser ces requêtes rares et à faire remonter les bons produits  », explique Mélanie Denis.

Ce système s’appuie également sur l’enrichissement automatique des fiches produits. Titres, descriptions, caractéristiques  : l’IA a déjà traité plus de 17 millions de références. Ce travail permet non seulement d’améliorer la visibilité des produits, mais aussi de nourrir le chatbot avec des informations de meilleure qualité. «  Plus une fiche produit est complète, plus le chatbot est pertinent. C’est un cercle vertueux  », souligne-t-elle.

Cdiscount en chiffres :

• 19 millions de visiteurs uniques par mois
• 7 millions de clients
• 20 millions de références
• 15 000 vendeurs
• 1 milliard de requêtes sur le moteur de recherche par an