Opération séduction pour Primark en France
Par Dalila Bouaziz | Le | Enseignes
Présente en France depuis dix ans, Primark poursuit son développement sur le territoire avec 27 magasins à date. Si le succès de l’enseigne irlandaise à bas prix ne se dément pas avec une clientèle au rendez-vous à chaque ouverture, elle est régulièrement épinglée parmi les enseignes de fast fashion.
Après l’adoption d’une loi à l’unanimité le 14 mars dernier visant à réduire les impacts environnementaux de l’industrie textile (interdiction de publicité, système de bonus-malus pour tenir compte des coûts environnementaux d’une production jugée excessive, sensibilisation des consommateurs sur l’impact environnemental…), ciblant la fast-fashion et notamment Shein et Temu, l’enseigne de mode irlandaise, présente sur le marché français depuis 2013, reprend la main en termes de communication. « Nous observons beaucoup de méconnaissance autour de notre marque, explique Christine Loisy, directrice générale de Primark en France, lors d’une conférence de presse ce mardi 26 mars. Durant notre audition en commission parlementaire, nous avons eu l’opportunité de présenter notre société devant Madame la rapporteure. Il y a un énorme travail de communication et d’éducation à faire de notre part. »
L’enseigne se dit ainsi « ravie » par cet « effort de communication » imposé par cette nouvelle loi auprès des consommateurs (les précisions seront données par différents décrets, NDLR). « Nous voulons que cette communication soit claire, scientifique, irréfutable et équitable », indique la dirigeante qui réfute le terme de fast-fashion à l’encontre de son enseigne. « Nous ne produisons que deux collections par an (automne-hiver et printemps-été) auxquelles il faut rajouter quelques collections capsules, argumente-t-elle. Nos produits sont fabriqués 8 à 9 mois avant leur commercialisation. Et nous le faisons lors des périodes creuses de nos sous-traitants en Asie pour baisser nos coûts de production. » A ce titre, Christine Loisy n’indique pas le nombre de références présentes dans un point de vente. « L’offre et le stock sont collés à la demande, argue-t-elle. Ce sont les directeur(rices)s de magasins qui sélectionnent quotidiennement l’assortiment souhaité. Nous avons très peu d’invendus et de soldes. »
Concernant la prolongation de la durée de vie des vêtements (éco-conception, fibres recyclées…), Primark indique y travailler avec des objectifs dès 2025 mais reste assez flous sur le pourcentage de matières principales recyclables de chaque catégorie de produit.
La France, son 3e plus gros marché
L’enjeu est fort pour l’enseigne de ne pas être vue comme une enseigne de fast fashion, la France est devenue son 3e plus gros marché après le Royaume Uni et l’Espagne (au global, l’enseigne compte 441 points de vente dans 16 pays). Primark compte 27 magasins dans l’Hexagone répartis dans les grandes agglomérations (péri-urbain ou périphérie de centre-ville), d’une superficie de 2 500 à 5 000 mètres carrés. Avec l’ouverture, l’an dernier de sept nouveaux points de vente dont le dernier à Rouen en décembre dernier.
« Nous avons commencé à essaimer sur le territoire, pointe Vincent Combet, directeur de l’expansion immobilière. Nous visons les agglomérations de 150 000 habitants avec une zone de chalandise de 300 000 habitants et des critères d’accessibilité importants géographiquement, logistiquement et en transports pour nos clients. Nous ne pouvons donc pas nous implanter n’importe où. » Il précise que « 50 villes » en France remplissent ces conditions.
Nous visons les agglomérations de 150 000 habitants avec une zone de chalandise de 300 000 habitants.
Un investissement moyen de 10 millions d’euros
« Chaque projet d’implantation nécessite beaucoup de travail et d’argent. Nous sommes sur 3 à 4 ans entre l’identification d’une opportunité et l’ouverture d’un point de vente avec un investissement de 10 millions d’euros en moyenne », rajoute-t-il. Les investissements de ses deux derniers magasins à Rouen et Echirolles ont nécessité respectivement 16 et 17 millions d’euros. Cette année, un point de vente sera inauguré à Tours mais quatre ouvertures sont prévues en 2025. Un rythme prudent.
L’enseigne refuse d’indiquer le nombre d’années nécessaires pour un retour sur investissement mais indique « être rentable en France ». « Le développement se poursuit parce que notre actionnaire est content [groupe familial ABF, NDLR], explique Christine Loisy. Notre entreprise existe depuis des décennies (création en 1969) et continuera à exister. En France, nous avons un développement tout à fait raisonnable avec 27 magasins en dix ans. Tous nos projets sont analysés avec minutie par nos financiers et acceptés ou rejetés en fonction de leur rentabilité. »
Elle botte néanmoins en touche sur l’objectif en termes de maillage du territoire. « En Espagne, où nous sommes implantés depuis plus longtemps, notre roadmap évolue. Nous la réévaluons pour la 3e fois avec des réflexions sur le format des magasins (1 000-1 500 mètres carrés) pour aller sur des plus petits marchés », souligne Vincent Combet. Si le retailer compte sept magasins en Ile-de-France, il n’est pas présent à Paris ne trouvant « pas la bonne opportunité » qui répond à ses critères même « si l’envie d’y être est bien là ». La dirigeante confirme également le choix de ne pas se lancer dans l’e-commerce.
Primark se hisse ainsi au 8e rang des enseignes en France (en volumes) et dispose d’une part de marché de 1,5 % en valeur et de 3 % en volumes (Kantar). L’enseigne a généré un chiffre d’affaires de 9,8 milliards de livres sterling, soit un peu plus de 10 milliards d’euros pour un résultat d’exploitation de 856 millions d’euros.