Comment Decathlon place l’éco-conception au cœur de ses produits

78 % des émissions de CO₂ de Decathlon sont dues à la fabrication de ses produits. Partant de ce constat, l’enseigne d’équipements sportifs a décidé de s’attaquer aux méthodes de fabrication en développant l’éco-conception. « Depuis une dizaine d’années, nous évaluons l’impact de nos produits via une première expérimentation de l’affichage environnemental, explique Marc Peyregne, responsable de l’eco-conception chez Decathlon. En 2016, l’entreprise a pris un virage stratégique en plaçant au cœur de son modèle le développement durable. » Avec l’engagement de réduire de 20 % ses émissions de gaz à effet de serre, sans compensation, entre 2021 et 2026.

Chaque leader d’équipe a ainsi des objectifs à atteindre. « Mon rôle est d’accompagner les ingénieurs, designers et chefs de produit dans la réduction de l’impact d’un produit mis sur le marché et que nous avons conçu. » 

Définir les critères d’éco-conception

Dans les faits, la norme ISO 14025 définit un produit éco-conçu sur l’ensemble de son cycle de vie : de l’extraction de la matière première jusqu’à sa fin de vie, en passant par l’usage… tout en maintenant des qualités [d’usage] équivalentes ou supérieures. « Nous avons décidé d’aller un peu plus loin car cette norme ne permettait pas aux équipes de conception de l’interpréter factuellement, souligne Marc Peyregne. Nous avons donc établi notre définition de l’éco-conception, avec des critères précis pour chaque catégorie de produits (textile, chaussure, vélo, matériel) sur lesquels les équipes peuvent s’appuyer. Pour l’ensemble de nos produits, nous devons diminuer d’au moins 10 % leur impact environnemental. » 

Une production plus responsable

Decathlon a aussi instauré des critères qualitatifs. Un produit textile doit par exemple intégrer dans ses matières principales au moins 70 % de matière de polyester recyclé, 90 % de coton biologique… L’enseigne travaille aussi sur des teintures plus responsables, en mettant le pigment directement au début de la fabrication du fil. « Nous n’avons pas besoin de plonger tout un tissu dans un grande bassin chauffé, souligne le responsable de l’éco-conception. Cela réduit drastiquement l’impact carbone de la production des tee-shirts en économisant l’énergie et l’eau. » La coloration des textiles est un processus à fort impact environnemental, consommateur d’énergie et impliquant l’utilisation de beaucoup d’eau et de produits chimiques pour les trempages dans des bains de teintures. Pour être qualifié d’éco-conçu, 80 % des casses et pannes les plus fréquentes doivent pouvoir être réparées.

Pour être qualifié d’éco-conçu, 80 % des casses et pannes les plus fréquentes doivent pouvoir être réparées.

Côté production, l’enseigne, présente dans 70 marchés et en production dans 40 pays, s’est engagée à l’arrêter l’utilisation de charbon chez ses fournisseurs. « Nous pouvons investir dans des machines mais nous privilégions un partenariat fort avec nos fournisseurs, en construisant avec eux une relation durable », explique-t-il.

100 % des produits éco-conçus d’ici à 2026

D’ici 2026, Decathlon se donne pour objectif d’atteindre 100 % de produits éco-conçus. « Aujourd’hui, nous sommes à 23 %, pointe Marc Peyregne. Mais cette augmentation est exponentielle, chaque année nous doublons la part de ces articles. Nous travaillons aussi sur les matières. Par exemple pour un tee-shirt, il y a trois points clés à prendre en compte dans son impact : la matière, la teinture et l’énergie. »

Dans cette éco-conception, Decathlon priorise en s’attaquant aux produits les plus impactants de son offre.

Dans cette éco-conception, Decathlon priorise en s’attaquant aux produits les plus impactants de son offre. « Si vous prenez le sport de randonnée, nous avons identifié trois produits phares, les plus achetés, la polaire, la tente et le tee-shirt. Nous mettons tous nos efforts dessus en termes d’investissements et de temps plutôt qu’un produit isolé moins vendu et qui toucherait donc moins de clients. »

Des catégories plus en avance que d’autres

« Quand on travaille sur l’écoconception, le temps s’allonge au début du projet car il y a une phase d’analyse des enjeux environnementaux plus importante, puis il faut trouver les solutions (matière recyclée, modes de teinture…) et réaliser un travail en R&D, pointe le responsable. Le reste est identique : qualité de production, d’approvisionnement… Nous sommes aujourd’hui sur un temps quasi similaire entre 10 et 20 % supplémentaires. Mon rôle est de faire en sorte que l’éco-conception devienne un standard de conception.  »

Certaines catégories commencent à avoir une part importante de produits éco-conçus. Sans grande surprise, le textile est plus avancé  vu que le travail a démarré il y a une dizaine d’années suivi de la catégorie chaussure, puis le matériel. « Sur les autres entités, nous sommes soit en R&D ou la qualité d’usage n’est pas encore là. Nous venons, par exemple, de trouver une solution d’éco-conception pour les combinaisons en néoprène (combinaison pour le surf, plongée, voile… qui permet que le corps garde une certaine température dans l’eau) qui seront commercialisables en 2024-25 après trois ans de recherche. » Côté prix, les produits restent dans le même positionnement de l’enseigne, des prix accessibles à tous. « Même si l’éco-conception peut revenir plus chère, nous travaillons les marges, la gamme complète de produits… »

« Dans chaque sport, nous avons un référent sur le développement durable. Au global, cela représente une centaine de personnes sur le réseau, responsables d’appliquer la stratégie de Decathlon au sein de leur sport et entité. L’équipe de développement durable est composée de 60 personnes et huit pour l’éco-conception. » Decathlon se donne les moyens de ses ambitions.