King Jouet multiplie les chantiers pour accompagner sa croissance
Par Clotilde Chenevoy | Le | Enseignes
Changement d’enseigne pour les Maxi Toys, création de King’Okaz pour la seconde main, vente de pièces détachées et agrandissement de sa logistique… Philippe Gueydon, directeur général King Jouet, a multiplié les annonces à l’occasion de son salon interne Jouerama. Retour sur ces nombreux projets.
Le Lion l’emporte sur l’ourson. La loi de la jungle se confirme aussi dans le milieu du jouet, au moins en France. A l’occasion de la 20e édition de Jouerama, le salon interne du groupe King Jouet qui présente les nouveautés produits de Noël au réseau, Philippe Gueydon, directeur général de King Jouet, a dévoilé les grands plans du groupe, dont l’annonce majeure est la fin de Maxi Toys en France. Les 92 magasins Maxi Toys tombent leur panneau pour prendre les couleurs du lion. Cette stratégie a déjà été appliquée en Suisse et le changement d’enseigne a amélioré la performance économique des magasins et la satisfaction client. En revanche, en Belgique et au Luxembourg, c’est Maxi Toys qui est conservé.
« Nous rationalisons nos enseignes pour en conserver une seule par pays afin d’avoir un poids qui compte vis-à-vis des clients et des fournisseurs, précise le directeur général. On se disperse avec deux réseaux. Nous allons fonctionner sur un modèle commercial unique avec les mêmes produits, la même stratégie commerciale et les mêmes prix. D’ici septembre, tous les changements auront été faits. »
Le groupe a déjà converti trois points de vente et il va entrer cet l’été en véritable phase d’industrialisation avec la bascule d’une quinzaine de magasins par semaine et la formation des équipes terrain au complet. La communication va également démarrer auprès des clients avec un travail sur la base CRM de Maxi Toys pour les avertir du changement d’enseigne et les faire adhérer au programme de fidélité de King Jouet.
Des résultats à la hauteur des chantiers engagés
Une telle opération demande beaucoup d’investissement mais l’enseigne au lion a de la réserve, engrangeant de bons résultats ces dernières années. Avec le covid, les Français ont plébiscité les jeux et jouets. Ainsi, en 2021, le groupe King Jouet, détenu à 49 % par la famille Gueydon et 51 % par le groupe italien Prénatal Retail Group, a réalisé un chiffre d’affaires HT de 400 millions d’euros, en croissance de 38 % et de 17 % à périmètre constant, ce qui exclut le rachat de Maxi Toys. Fort de ses résultats, l’enseigne se revendique d’ailleurs le leader phygital de la vente de jeux et jouets en France avec 12,5 % de parts de marché.
Le changement de panneau ne viendra pas freiner les autres chantiers du groupe nécessaires à sa croissance. Citons ainsi un investissement de 12 millions d’euros dans l’extension de sa plate-forme logistique de Rives-sur-Fure (26). Elle passe ainsi de 24 000 m² à 42 000 m². « Avoir sa propre logistique dans un contexte de rareté des marchandises est un véritable atout », souligne Philippe Gueydon. Le nouveau site permettra aussi d’améliorer l’activité digitale avec la création d’une cellule 100 % dédiée à l’e-commerce.
« Nous avons un travail à mener pour être plus efficaces dans le traitement des commandes en ligne, estime-t-il. Le digital représente à fin mai 2022 14 % de notre chiffre d’affaires. Mais cette activité est très irrégulière et nous avons des pics sur la fin d’année. Nous migrons d’ailleurs sur le cloud pour sécuriser la technique et pouvoir absorber 35 000 commandes par jour. »
King’Okaz, une nouvelle enseigne pour l’occasion
Parallèlement au changement de panneau et au renfort de la supply chain et de l’informatique, King Jouet ouvre un autre chantier de poids : la seconde main. Le retailer s’essaie à cette activité en ouvrant des magasins sous enseigne King’Okaz.
« Le jouet d’occasion est une attente de nos clients et ce marché existe déjà via des sites généralistes, analyse Philippe Gueydon, mais comme spécialiste du jouet, nous voulons apporter autre chose, notamment en garantissant les articles. Acheter en ligne c’est bien, mais on ne voit pas le produit. » En effet, selon Xerfi Precepta, plus de 7,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires ont été générés en 2020 par le marché de l’occasion, dont la moitié par l’e-commerce.
Le premier King’Okaz du spécialiste des jeux et jouets a ouvert début mai à Saint-Marcel-lès-Valence (26). Les produits d’occasion sont disséminés à côté des produits neufs, afin de positionner la seconde main comme une vraie alternative. « Nous voulons raconter une histoire autour de l’éco-responsabilité, assure le dirigeant. Mais dans le jouet, ce qui crée du trafic c’est la nouveauté. Nous avions testé une enseigne qui ne vendait que des produits de fin de série il y a quelques années et cela n’avait pas fonctionné. Ce magasin propose donc un tiers d’occasion et deux tiers de produits neufs. »
Tout une procédure à créer avec la seconde main
Pour capter les produits de seconde main, les clients ramènent directement au magasin leurs jeux ou jouets. King Jouet n’accepte pas tout, car il offre une garantie de 12 mois sur la seconde main. Ainsi, les jouets extérieurs ou électroniques ne sont donc pas repris. Une grille de tarification, pour rester cohérent par rapport au neuf, a également été créée.
Enfin, chaque magasin a un responsable occasion qui se charge de vérifier les jeux et jouets et édite des bons d’achat utilisables immédiatement pour un nouvel article neuf ou d’occasion. Les premiers résultats sont bons. « Ce point de vente a une performance de chiffre d’affaires supérieure au réseau, annonce Philippe Gueydon. Le panier moyen baisse car les articles d’occasion sont moins chers, mais le trafic augmente de manière forte. On va voir comment cela évolue dans le temps. »
Pour aller plus loin dans son test, King Jouet va profiter du changement de panneau de six Maxi Toys pour qu’ils passent King’Okaz. Mais « pour aller plus loin sur le sujet de la seconde main, et dépasser deux bouts de rayons en magasin, il faut aussi qu’on embarque les fournisseurs et que l’on trouve une mécanique gagnant-gagnant, juge le directeur général. Nous avons un modèle à construire. »
De la vente de pièce détachée de jeux et jouets en ligne
Dans ces réflexions autour de la circularité, King Jouet entame un autre combat auprès de ses fournisseurs autour de la pièce détachée. L’enseigne souhaite en effet proposer de la réparation de jeux et jouets en commercialisant en ligne le pion ou les cartes manquantes. Des premières discussions ont été entamées avec les fournisseurs, avec des échos variés. Certains sont partants, d’autres préfèrent le faire seuls de leur côté mais beaucoup n’ont pas la capacité de le faire.
King Jouet a peut-être une carte à jouer avec ses 18 marques propres aussi sur ce volet-là. Ces dernières sont au cœur de la stratégie de l’enseigne avec 1000 références et pèsent environ 20 % du chiffre global. Depuis 2019, un tournant a d’ailleurs été pris pour développer des produits le plus éco-responsables possibles. Citons ainsi la gamme Wooden Play, des jouets en bois FSC sortie en 2020 ou encore les doudous OekoTex, une norme qui va au-delà des attentes dans le jouet. Le combat de cette année est de favoriser le sourcing proche pour limiter l’empreinte carbone. « Nous sommes convaincus que pour la fin d’année, ces produits joueront un rôle clé car ils ont un rapport qualité-prix qui sera porteur en fin d’année », estime Philippe Gueydon.
En effet, tous ces chantiers s’opèrent dans « une année qui sera tout sauf un long fleuve tranquille, juge le directeur général. La filière n’est pas trop inquiète sur les perspectives de l’activité car on imagine que le secteur du jouet sera moins impacté que d’autres face à l’inflation. La problématique consiste à jauger l’impact prix. Nous estimons qu’en moyenne on devrait atteindre 10 % de hausse des prix. Cela va créer une tension sur le pouvoir d’achat mais la baisse pour le marché devrait se situer autour de 4 à 6 % et avec la hausse des prix on devrait finir en positif. »