D’une enseigne à une marque, comment Jonak se transforme
Par Clotilde Chenevoy | Le | Enseignes
Lisa Nakam, directrice générale associée de Jonak, revient sur le plan de transformation de l’entreprise, largement inspiré des codes des DNVB.
Marie-Claire, Voici, Elle, Grazia… Pas une sélection de chaussures de cet hiver n’inclut pas au moins un produit Jonak. Créée en 1964, la marque-enseigne dirigée par Joseph, Marcel et Lisa Nakam a su rester tendance au fil des années en faisant évoluer ses gammes. Et dernièrement, la transformation s’est aussi appliquée à l’organisation même de l’entreprise afin de coller aux derniers standards du retail, notamment ceux des marques digitales. « Nous venons du retail, nous avons beaucoup de lourdeur à gérer, mais pourquoi ne pas être plus fort sur le digital en s’inspirant des DNVB », explique Lisa Nakam, directrice générale de Jonak.
Cette vision du commerce a été définie depuis de nombreuses d’années, mais les grandes manœuvres ont été accélérées début 2020 à cause de la crise sanitaire. Elle a conduit l’entreprise familiale à revoir son organisation, ses outils et surtout « à penser différemment, insiste la dirigeante. Désormais, le digital est intégré dans l’entreprise avec une vision plus globale. Chaque équipe métier gère elle-même le digital et le magasin. Il n’y a pas de guerre interne car le digital est partout. » Cette approche permet par exemple plus d’unité dans la gestion du marketing, comme dans le merchandising, avec une cohérence sur la visibilité des produits entre les vitrines des magasins, la home page du site et dans les newsletters de l’enseigne.
Une transformation digitale sans armada d’ingénieurs
Cette transformation digitale n’inclut pas en revanche le recrutement d’une équipe informatique lourde. « Notre nouvelle organisation nous a permis de rentrer dans le monde des DNVB et d’arrêter de penser retail uniquement mais nous n’avons pas de technique en interne, précise Lisa Nakam. Nous restons concentrer sur notre core business, en nous appuyant sur des partenaires. Les métiers comprennent les enjeux du digital sans avoir besoin d’ une formation IT poussée puisque nous avons déjà cette compétence chez nos partenaires spécialistes. »
Techniquement, la base de cette transformation a été l’unification des stocks, « qui a un impact direct sur le chiffre et qui nous a permis aussi de déployer d’autres services autour de la livraison », souligne la dirigeante. Jonak a également adopté des outils omnicanaux comme Hipay pour le paiement ou encore WShop pour sa plate-forme de commerce unifiée qui lui permet de proposer tous les services omnicanaux essentiels à une marque en 2022. Par exemple, l’outil aide au suivi des ventes et indique aussi celles qui n’ont pas abouties faute de stock. Identifier les manques à gagner a permis à la marque d’ajuster sa production et également de gérer le sujet dans sa relation client. « Nous avons d’excellent taux de conversion depuis que nous proposons aux clientes de laisser leur e-mail pour être averti dès qu’une mise en stock sera faite », se réjouit la directrice générale. Soit une pratique courante chez les DNVB.
A chaque canal ses produits pour coller à la cible
Dans ses prochains développements, Jonak compte accélérer sur le digital et sur l’international. L’enseigne de chaussures féminines compte 90 points de vente dont une cinquantaine de succursales en France et teste depuis peu l’international. Elle qui se déploie via des corners dans des grands magasins avec une sélection particulière. « Nous comptons une quarantaine de corners à l’étranger, c’est un maillage qui nous permet de tester ce marché avec une sélection de produits et nous réalisons aussi des ventes cross-border », indique la dirigeante.
En effet, Jonak a l’avantage historique d’avoir toujours eu ses propres usines partenaires, s’appuyant sur trois sites de production au Portugal. Outre le fait que la marque peut valoriser aux yeux des clients sa provenance européenne, cette proximité lui offre une grande agilité dans ses collections et dans les livraisons. « Ces usines nous permettent de faire ce qu’on l’on souhaite, autant déclencher un réassort rapide que d’éviter les surstocks de production pendant les mauvaises périodes compliquées comme ce fut le cas en 2020, et nous ajustons nos collections selon les besoins des marchés », détaille Lisa Nakam.
Ainsi, pour la Russie par exemple, de la fourrure est ajoutée dans 80 % de la collection hiver. Jonak crée aussi des collections capsules avec des collaborations extérieures vendues uniquement en ligne, par exemple pour certaines marketplaces. « Nous ne vendons pas la même chose à tout le monde, nous nous adaptons à la cible et nous gardons surtout la main sur les produits et sur notre marque, pointe la directrice générale. D’une enseigne, Jonak est devenue une marque. »
Une stratégie qui a conduit la direction à investir sur les réseaux sociaux, valorisant notamment l’histoire de l’entreprise familiale et misant sur le marketing d’influence avec ses propres règles. « Nous sommes présents sur TikTok, Facebook et Instagram, précise Lisa Nakam. Nous prenons le parti de ne pas payer pour de l’influence mais juste d’offrir nos produits à certaines influenceuses. C’est une question d’état d’esprit. Si le produit fait plaisir, avec une expérience sympa, il sera partagé sur les réseaux et cela aura un effet vertueux. On a d’ailleurs industrialisé l’influence en rapprochant les cibles Jonak et les bases des influenceuses la cible de la personne et lui donnant un cadeau adapté. » Au-delà du style, il y a par exemple l’âge qui est pris en compte. On ne poussera pas à une influenceuse dont la communauté a en moyenne 18 ans des gammes de produits chers car sa cible n’aura pas forcement le budget pour.
Fort de cette nouvelle organisation et des derniers investissements consentis dans son infrastructure, Jonak compte doubler ses ventes à l’étranger, notamment avec le digital. Cette dernière activité représente actuellement 40 % du chiffre d’affaires et l’international est à 15 %, avec l’ambition de monter à 30 %. « Nous étions uniquement sur une croissance organique, nous allons désormais investir », conclut Lisa Nakam.