Alibaba : « Avec la Nuit AliExpress, nous voulons créer du lien entre le physique et le digital »
Par Clotilde Chenevoy | Le | E-commerce
Sébastien Badault, directeur général d’Alibaba France, revient sur les enjeux du Single Day et de la première Nuit AliExpress, la croissance de la marketplace et les ambitions du groupe chinois en Europe.
Le festival du Single Day débute aujourd’hui. Comment est perçu cet événement en France ?
Il y a 2 prismes. Le premier c’est celui des marques françaises qui vont tester le marché chinois, parfois pour la première fois comme pour Fusalp. Ils ont d’abord créé leur magasin sur Tmall il y a plusieurs mois pour se préparer au festival 11.11. Nous les accompagnons main dans la main pour l’évènement car il y a toujours des choses de dernière minute à gérer, à la chinoise. Il faut savoir faire preuve de réactivité. Les deux dernières semaines avant l’événement et même pendant, c’est toujours frénétique. Il faut par exemple ajuster l’offre qui évolue tout le temps. En effet, vous vendez un produit avec un stock de 1000 pièces, si tout part très vite, il faut prévoir d’autres articles. Et inversement, si cela ne se vend pas, il faut ajuster. Il y a tout un jeu autour de l’offre et de la demande qui nécessite une préparation. Ce n’est pas toujours facile pour les marques, même pour les plus aguerries au marché chinois. D’autant que l’événement se déroule désormais sur une semaine.
Pourquoi cet allongement de la durée ?
Cela permet de relâcher la pression sur la supply chain et de pouvoir envoyer des commandes groupées en un seul paquet. D’un point de vue RSE c’est mieux. Pour les marques, c’est aussi un peu plus simple à gérer. Par ailleurs, si le Single Day a été créé par Alibaba il y a 9 ans, l’événement s’est imposé chez tous les acteurs en ligne et dans les magasins avec des temps promotionnels plus longs. Nous devions nous mettre au diapason du marché mais nous gardons la frénésie et le décompte du premier jour.
Si on revient sur la France, est-ce que les consommateurs connaissent le Single Day ?
Côté Aliexpress, chaque année, nous constatons que l’évènement prend de l’ampleur. D’ailleurs d’autres marques s’emparent du 11.11. Il y a 2 ans, Carrefour avait proposé pendant 11 jours 11 produits pour les célibataires. Cette année, nous y allouons des moyens importants. Nous organisons le jeudi 11 novembre au soir à Paris de Porte de Versailles une grosse soirée, la Nuit AliExpress.
Le premier objectif consiste à faire plaisir à nos acheteurs. Ce sont majoritairement des jeunes et ils ont beaucoup souffert de ne pas pouvoir faire la fête ces derniers mois. Nous leur proposons de venir le faire ensemble. Le second objectif porte sur la création de lien entre le physique et le digital. Ce point est complètement intégré dans la stratégie globale d’Alibaba avec le New Retail. La réflexion consiste à miser sur le physique en le sublimant avec du digital.
Quel relais en ligne avez-vous prévu avec cet événement ?
Lors de cette soirée, il y aura des influenceurs qui réaliseront des livestreaming en présentant des produits qu’ils portent et qui sont disponibles sur AliExpress. Nous reproduisons la même philosophie qu’avec notre dernier pop-up store, installé aux Halles à Paris. Il nous a servi à mettre en avant des articles pour montrer la qualité des pièces et le digital a servi à amplifier ce projet. Le pop-up store n’était présent que 3 jours, nous avons fait des livestreaming pour le montrer au plus grand nombre.
Si quelques milliers de personnes sont venues physiquement dans le magasin, c’est plusieurs centaines de milliers d’internautes qui l’ont vu virtuellement. La démarche est identique pour le concert. Nous attendons beaucoup de monde physiquement mais il y aura encore plus de monde à distance avec le digital.
D’ailleurs l’évènement nous servira à prendre la mesure du 11.11 en France et cela nous servira aussi à lui donner un vrai sens. Cela a toujours été un peu difficile en France car la connotation du 11 novembre est différente. Nous devons trouver notre place en phase avec la croissance d’AliExpress en France. Je ne peux pas vous communiquer de chiffres mais tous les panels soulignent la montée de la plate-forme en termes de ventes et d’audience. C’est pareil avec le 11.11, les gens y sont plus sensibles d’autant plus qu’ils commencent à comprendre la mécanique de cet événement.
Des mesures logistiques spéciales pour le 11.11
AliExpress, la marketplace du groupe Alibaba, a adapté sa logistique via Cainiao, sa filiale à l’approche du festival du 11.11. Ainsi, la plateforme garantit à tous ses utilisateurs livraison sous 10 jours pour toute livraison transfrontalière ou de 3 jours pour les livraisons en local. AliExpress s’engage également à rembourser ses clients en cas de retard pour les commandes expédiées des entrepôts de sélection situés en Chine et des entrepôts d’outre-mer opérés par Cainiao.
AliExpress qui s’adapte à un marché local, c’est assez nouveau…
En effet, nous sommes en train de nous adapter à notre environnement notamment en créant des événements locaux. Ce n’était pas du tout le cas au début. Quand j’ai commencé il y a 5 ans chez AliExpress, c’était une plateforme complètement pilotée depuis la Chine avec 100 % des marchands chinois et des temps de livraison extrêmement longs.
Nous sommes en train d’intégrer des marchands locaux sur la plate-forme Aliexpress. ils représentent environ 30 % de l’offre et nous allons encore accélérer sur ce sujet.
Désormais, nous avons recruté une équipe ; nous investissons dans des événements, du sponsoring ou du marketing ; et nous sommes en train d’intégrer des marchands locaux sur la plate-forme Aliexpress qui représentent actuellement environ 30 % de l’offre et nous allons encore accélérer sur ce sujet.
Votre objectif n’est plus de séduire des marques pour vendre en Chine ?
La première étape consistait à envoyer les marques vers TMall. Nous avons bien travaillé ce sujet. La deuxième étape consiste désormais à inciter les marchands à vendre via notre plate-forme en France, en Espagne, en Pologne, au Brésil, etc. La logique est de pouvoir leur donner accès à d’autres marchés. Ce qui les intéresse beaucoup en travaillant avec nous c’est qu’ils peuvent atteindre une population qu’ils ne touchent pas forcément par le biais d’autres marketplaces, à savoir les jeunes. Nos commissions sont aussi plus faibles. Et ils peuvent également apprendre des tendances très lourdes qui se développent en Chine et qui ont fait leur preuve. Par exemple, le marché du livestreaming a atteint 16 milliards de dollars en très peu de temps et Alibaba a lancé Taobao Live sur ce marché qui est devenu leader. Nous proposons notre technologie de livestreaming sur Aliexpress et nous aidons les marchands à réaliser une version européenne de ce business.
Allez-vous ouvrir des magasins physiques comme en Espagne ?
Il y aura peut-être d’autres évènements physiques avec des fêtes mais pas forcément de pop-ups stores. C’était dans notre plan stratégique pré-covid, mais cela a été mis de côté. Toutefois, tout peut aller très vite. Par exemple, si on constate que la soirée du 11.11 est un vrai succès au niveau de l’événement physique en tant que tel et de la répercussion sur les ventes, peut-être que nous organiserons une autre soirée pour Noël. Nous y réfléchissons car nous estimons que c’est une bonne manière de faire le lien entre les clients, les partenaires et la technologie.
Comment intégrez-vous dans votre stratégie la montée des sujets RSE ?
Cette tendance, je la vis à titre personnel en tant que citoyen et avec mes enfants et j’essaie d’insuffler cette dynamique dans mon entreprise. Mais Alibaba est aussi très conscient de ces enjeux. Dans le retail en Chine, ce sont les jeunes de 19 à 30 ans qui imposent les tendances et tout va très vite. Ils nous obligent à nous réinventer et à trouver de nouveaux moyens d’interagir avec eux. Nous avons constaté leur plus grande sensibilité à la RSE. En réponse, Alibaba a lancé entre autres il y a trois ans une plate-forme de revente d’articles de seconde main, qui s’appelle Idle Fish. C’est celle qui croît le plus en ce moment, notamment sur les 18 derniers mois.
D’autres actions sont aussi faites par les différentes entités du groupe pour travailler les différents leviers RSE. Ant Group plante des arbres à chaque transaction, il y a le développement de la livraison en véhicule électrique, nous cherchons aussi à limiter l’usage du plastique dans les cartons et nous avons mis en place des grands points de collecte des colis vides pendant le Single Day.
Vous avez multiplié les annonces touchant à la logistique avec tout dernièrement l’arrivée des casiers de retrait. Où en êtes-vous dans vos différents développements ?
La logistique est au cœur de l’e-commerce et nous avions un vrai retard avec les produits venant de Chine. Les délais étaient très longs. La première étape a été de créer un centre à Liège. Il est opérationnel mais il n’est pas encore finalisé. Il sert à accueillir les produits de Chine en Europe. La deuxième étape c’est l’ouverture d’un centre de distribution en France, que nous avons ouvert il y a quelques mois. Il nous sert à dispatcher les colis qui arrivent.
Entre le centre de Liège, le nouveau site de dispache en France et les casiers de retrait, nous sommes à une nouvelle étape de notre développement.
Dernièrement, nous avons annoncé l’implantation de casiers. Cela fonctionne bien en Chine et cela offre plus de praticité par rapport à un magasin qui n’est pas toujours ouvert. Là encore, on s’appuie sur l’expérience qu’on a pu avoir en Chine et on essaie de l’adapter en local.
L’enjeu est de faire en sorte que nos clients puissent avoir leurs produits plus rapidement et que les retours soient aussi plus faciles, le tout pour avoir une meilleure expérience client. Au début, les gens étaient attirés par Aliexpress par la gamme de choix qui est très large et par les prix bas. En plus de cela, on essaie d’ajouter du ludique et du fun pour changer du shopping commodité avec un meilleur service client.
En moyenne, vous livrez en combien de temps ?
On se donne comme objectif de descendre sous les 10 jours de délai et à terme d’arriver à 72 heures sur les meilleures ventes grâce à l’entrepôt. C’est une étape de plus dans la localisation des activités d’Alibaba et Aliexpress en France qui pose un nouveau jalon dans notre développement.
AliExpress étend son réseau de lockers avec Match
Après avoir annoncé l’arrivée de ses premiers lockers en France en septembre dernier, AliExpress, la marketplace mondiale du groupe Alibaba, annonce son partenariat avec Match, une chaîne de supermarchés français, via Cainiao Network, la filiale logistique du groupe Alibaba.
Ce seront 70 lockers qui seront ainsi installés dans des supermarchés Match situés dans le Nord et l’Est de la France, pour permettre aux consommateurs AliExpress résidant dans les villes de Lille, Amiens, Strasbourg, Metz, Nancy et leurs environs de retirer librement et rapidement leurs commandes dans des consignes automatiques.
Rappelons que l’objectif consiste à déployer 650 lockers à travers toute la France d’ici décembre 2021.