Frédéric Duval (Amazon) : “Livrer vite n’empêche pas de livrer green”
Par Clotilde Chenevoy | Le | E-commerce
Livraison verte, Black Friday, Prime Vidéo, ou numérisation des PME, Frédéric Duval, directeur général d’Amazon, revient sur les derniers projets phares de l’entreprise.
Comment s’est déroulé l’année 2021 jusqu’ici ?
2021 est une bonne année, mais je n’ai pas connu de tendance négative en 16 ans… Elle suit une année 2020 qui a été extrêmement perturbée par plein de choses et en particulier par les confinements. Le chiffre d’affaires était en 2020 de 7,3 milliards d’euros. Le début de l’année 2021 a confirmé l’accélération de la transition de la consommation vers le numérique. Cela impose que les acteurs économiques français s’engagent eux aussi dans ce sens, d’autant qu’il y a une complémentarité évidente entre le physique et le numérique. L’objectif consiste à augmenter leur zone de chalandise naturelle pour qu’elle ne soit plus uniquement leur quartier ou leur région, mais la plaque européenne.
Avec le covid, avez-vous constaté une hausse des PME sur votre marketplace ?
Nous avons constaté que de plus en plus de commerces cherchent à se digitaliser. Et nous les accompagnons par exemple au travers de l’Amazon Academy dont nous avons organisé la 5e édition le 10 novembre. L’objectif consiste à apporter des réponses concrètes aux chefs d’entreprises. En plus de cette matinée, nous avons aussi mis en place un accélérateur du numérique avec 20 partenaires qui proposent en ligne une cinquantaine de formations pour permettre à tout un chacun de découvrir les opportunités qu’offre le numérique jusqu’à se perfectionner sur des choses un peu plus pointues. Nous avons aujourd’hui 8000 entreprises qui sont en train de se former. Et pour aller encore plus loin, nous innovons en créant un Boot Camp pour accompagner plus fortement les PME qui le souhaitent sur le numérique.
Que répondez-vous aux détracteurs qui évoquent un risque de désintermédiation dès lors que l’on va sur une marketplace ?
Je ne crois pas que les clients qui viennent chez Amazon souhaitent que nous partagions leurs données personnelles. Ce n’est pas une question de désintermédiation, mais une question de protection des données personnelles des clients. Quant aux entreprises qui vendent chez Amazon, elles peuvent interagir avec leurs clients sans transfert de données et elles accèdent aux informations nécessaires pour faire du commerce.
Comment s’annonce le Black Friday ?
L’opération a déjà démarré sur le site Amazon. Le Black Friday s’annonce bien pour plusieurs raisons. Premièrement, nous avons du stock, les produits et des offres intéressantes. Deuxièmement, contrairement à l’an dernier, je n’ai pas l’intention de décaler la date au dernier moment car la situation sanitaire est bien meilleure. Ce décalage d’une semaine avait entraîné des répercussions sur les opérations. Troisièmement, les gens ont envie de se faire plaisir. On sort de 18 à 24 mois qui n’ont pas été tout rose et je pense que les gens vont vouloir profiter et faire des économies.
Logistiquement vous êtes prêts à encaisser les pics ?
Oui et nous venons de renforcer notre maillage avec l’arrivée d’un nouvel entrepôt à Metz, qui devient notre plus gros site en France. Il fait 182 000 m2 en développé, réparti sur quatre niveaux avec la technologie Amazon Robotics. Il nous permet de stocker nos marchandises et celles de nos marchands tiers, et de préparer des commandes que nous expédions en France et Europe.
100 000 articles sont estampillés sur notre site Climate Pledge Friendly, un label qui se base sur 25 standards environnementaux.
Est-ce que la tendance est toujours à une livraison la plus rapide possible ou avec la montée de la conscience environnementale un principe de slow delivery émerge ?
Nous sommes toujours sûr de la vitesse mais avec une contrainte supplémentaire qui est de se diriger vers de la livraison Green. Nous annonçons d’ailleurs aujourd’hui qu’à Paris, 2 commandes sur 3 avec sont livrées par notre service Amazon logistique en mode 0 émission. Et cela ne ralentit en rien les livraisons. Au contraire, nous arrivons à faire mieux que l’an dernier. Nous plaçons ainsi les produits au plus près du client et les études démontrent que l’e-commerce est mieux disant pour l’environnement.
En plus de ces livraisons, nous avons d’autres initiatives pour développer des activités green. Par exemple, nous travaillons avec un fabricant de vélo pour concevoir un modèle qui répond aux contraintes de livraison d’Amazon Logistics et nous avons regroupé 25 standards sous l’appellation Climate Pledge Friendly pour identifier les produits plus durables et vertueux. 100 000 articles sont déjà estampillés sur notre site.
Constatez-vous la montée des sujets RSE sur vos ventes ?
Nous ne l’avons pas mesuré et nous sommes sur une démarche volontariste, avec un engagement d’être carbone neutre en 2040. Nous verrons si les clients réagissent favorablement à ces changements. J’ai l’impression qu’il y a quand même au moins une partie des consommateurs qui sont sensibles à ces éléments. Nous avons d’ailleurs créé récemment une boutique Made in France avec 230 000 produits. Il est un peu tôt pour communiquer sur des chiffres ou des tendances mais l’appétence client est réelle. Nous comptons continuer à la promouvoir et l’offre sera encore élargie parce qu’il y a énormément de produits Made in France que nous n’avons pas identifiés.
Où en êtes-vous dans votre développement sur l’alimentaire ?
Si on évoque les courses faites au marché de produits frais, vous trouverez une offre sur notre site. Des PME comme la boucherie Victor proposent de la viande via la marketplace. Mais nous nous concentrons surtout sur les biens de consommation courante. Cela fonctionne très bien, notamment grâce aux abonnements. Le bouton Dash a disparu mais le service est très utilisé et il vient d’ailleurs d’être renommé « Prévoyez et économisez ». De plus, si la sélection éligible à la livraison automatisée était relativement restreinte il y a 2 à 3 ans, elle est désormais beaucoup plus large, ce qui a eu pour effet de renforcer la demande.
Ouvrir un magasin Amazon en France, ce n’est pas dans mes plans aujourd’hui.
Et concernant votre partenariat avec Monoprix ?
Nous sommes satisfaits des chiffres même si cela ne va jamais assez vite ! Là où nous faisons 50 % de croissance, nous aimerions en faire 200 %. Les résultats sont très encourageants, il y a une répétabilité de l’offre de la commande qui est très forte. Autrement dit, quand un client a choisi une fois de commander sur Monoprix via Amazon, il revient. Parce que c’est pratique et fiable. C’est un bel exemple de complémentarité entre le physique et le digital qui a créé des emplois dans les deux entités. La commande est passée sur le site amazon.fr puis elle est routée vers un magasin Monoprix pour être préparée. Elle est ensuite mise au bord du point de vente pour qu’un coursier ou un livreur Amazon passe la prendre pour la livrer.
Pourquoi ne pas gérer le service en direct ?
Parce que cela nécessite de construire un réseau de magasins comparable à celui de Monoprix. Aujourd’hui, je ne peux pas faire cela, mais surtout et cela ne servirait pas les intérêts de mes clients. Il y a des gens qui font cela très bien comme Monoprix, Carrefour City, Casino, U Express… Ouvrir un Amazon Fresh en France, ce n’est pas dans mes plans aujourd’hui.
Et un magasin physique Amazon non alimentaire ?
Il y a des concepts qui fonctionnent bien aux Etats-Unis mais ce n’est pas un sujet pour le moment en France.
Nous avons sensiblement amélioré l’offre de Prime Vidéo et nous devons confirmer en 2022 l’appétence pour ce service.
Quelles sont vos ambitions pour 2022 ?
Faire bien nos activités principales avec l’ajout de sélection, des prix justes, de la livraison en temps et en heure et une prise en charge en 30 secondes d’un client qui nous appelle. C’est une ambition plus difficile quand on fait 25 à 30 % de croissance par an.
Deuxième sujet, nous avons sensiblement amélioré l’offre de Prime Vidéo et nous devons confirmer en 2022 l’appétence pour ce service. Nous continuons à développer l’offre, dans le cadre juridique français, et nous devons valoriser nos investissements dans le football, Roland Garros, ou encore les séries et les films français créés avec Amazon Original. Nous avons une grosse équipe en France dans laquelle nous allons continuer à investir.
Enfin, j’aimerais bien qu’en 2022, notre entreprise soit perçue comme un acteur économique important français. Nous sommes certes nés aux États-Unis, mais désormais nous sommes une entreprise française, avec 14500 salariés et une implantation très large. Nous aidons plein d’entreprises à se développer avec le numérique. Amazon ce n’est pas qu’une entreprise digitale, elle contribue fiscalement, humainement, et économiquement à la France.