Comment Fnac Darty s’est organisé pour valoriser sa data
Par Clotilde Chenevoy | Le | Data
Alexandra Suire, directrice régie & Trade @Retailink, revient sur la manière dont Fnac Darty a structuré son organisation pour pouvoir extraire la valeur de ses datas et de ses audiences.
Comment accélérer sur la valeur à extraire des datas et des audiences ? Cette question, nombre de dirigeants se la posent actuellement… Chez Fnac Darty, la réflexion a été initiée en 2017 selon Alexandra Suire, directrice régie & Trade @Retailink et elle a dernièrement donné naissance à la plate-forme Retailink by Fnac Darty.
Historiquement, nous ne voulions pas partager la donnée. Désormais, nous savons qu’il y a des leviers intéressants à actionner en partageant la donnée dans un cadre précis.
Cet outil met à disposition de manière uniformiser les données du groupe et comme avec les campagnes Google ou Facebook, les marques peuvent piloter en toute autonomie leurs campagnes, définir les ciblages, les formats et les durées des opérations. Depuis septembre, le groupe a ajouté des données business comme les niveaux de ventes, de stock ou les parcours clients. « Ces deux briques se répondent pour analyser la performance business, souligne la directrice. Il y a une réelle demande de la part des agences pour connaître l’environnement retail et aussi des marques car elles veulent comprendre le business que l’on fait ensemble. Elles peuvent agir de manière immédiate pour améliorer leur ROI. Il y avait aussi une attente quant à la transparence des campagnes. C’est d’ailleurs un changement de philosophie pour un distributeur que de s’ouvrir autant. Historiquement, nous ne voulions pas partager la donnée. Désormais, nous savons qu’il y a des leviers intéressants à actionner en le faisant dans un cadre précis. La transparence crée un cercle vertueux »
Les premières étapes clés : acquérir les talents et structurer l’offre
Avant d’aboutir à ce raisonnement et à la création de ces outils, Fnac Darty a dû repenser totalement son organigramme et ses procédures. La première étape a été de structurer l’activité. « Historiquement, nous avons toujours fait du trade marketing avec de la coopération entre les marques et les enseignes mais en 2017, la réflexion s’est posée sur comment aller plus loin, indique Alexandra Suire. Après avoir défini nos ambitions, nous avons recruté des experts pour développer nos compétences internes. L’objectif était autant de définir le savoir-faire dont nous avions besoin que de choisir la bonne technologie pour l’avenir. »
En parallèle de cette étape, Fnac Darty a travaillé son offre en imaginant d’autres formats à proposer aux marques. « Les équipes de trade marketing ont réfléchi à comment apporter plus de valeur, notamment grâce à la technologie et en maximisant tous les points de contact avec l’enseigne et en capitalisant sur nos données », précise l’experte retail media.
Fnac Darty a créé un catalogue d’offres qui tient compte des audiences et des différents types d’activation publicitaires, plus ou moins digitales. Un investissement conséquent a été réalisé en 2019 pour ajouter 2000 écrans dans 300 magasins du groupe. « Le DOOH (Digital Out-Of-Home) nous permettait de mieux cibler nos campagnes en adaptant les messages selon l’implantation de l’écran, explique Alexandra Suire. Sans dévoiler de chiffres, nous avons tout de suite eu une rentabilité qui nous a fait accélérer sur le sujet en allouant plus de moyens. »
Valoriser que 36 millions de Français sont des clients Fnac ou Darty
Aujourd’hui, le groupe revendique 8 millions de porteurs de cartes de fidélité, 26,7 millions de visiteurs uniques (selon Médiamétrie), avec 740 magasins multi-formats. « 36 millions de Français sont des clients Fnac ou Darty », se réjouit Alexandra Suire. Le groupe est désormais en capacité de mesurer l’efficacité des campagnes, même dans une démarche de ROPO (Research Online, Buy Offline). « Nous y arrivons grâce à la carte de fidélité et pour les clients non encartés via la collecte de l’email nécessaire pour la facture en réconciliant digital et physique », précise-t-elle.
Depuis 2017, le groupe a ajouté différentes fonctionnalités pour affiner le ciblage avec du retargeting ou encore proposer du search retail. Cette dernière fonctionnalité consiste à proposer aux marques de sponsoriser les recherches pour apparaître dans les premiers. « 60 à 70 % des clics sont faits sur la première page de la liste des résultats, indique la directrice. Cette solution a boosté l’appétence des marques pour le retail media. Elles peuvent traquer et mesurer leur investissement en identifiant formellement combien 1 euro a rapporté. »
Plus récemment, et sous l’effet covid-19, ce sont les solutions de chat vidéo ou de livestreaming qui sont venues enrichir le catalogue « pour apporter du conseil et rapprocher les marques des consommateurs, pointe l’experte retail media. On en est encore qu’au balbutiement quand on voit le business que cela génère en Chine. »
Changer les mentalités et passer à une expertise transverse
Au-delà de la structuration de l’offre et du développement des outils, l’un des gros chantiers avec la création de l’activité Retail Media a été de faire évoluer les méthodes de travail. « Désiloter les fonctionnements historiques a été un vrai challenge, assure Alexandra Suire. Historiquement, il y un cloisonnement entre le marketing et le commerce alors qu’avec le retail media nous avons besoin de rapprocher ces deux expertises. » Le volet retail impose de connaître les stocks et la vie des magasins tandis que la partie média demande à suivre au plus près les réalités et les chiffres des campagnes.
In fine, de trois personnes en 2017, l’équipe Retail Media se compose désormais de 30 personnes, « sans compter l’expertise que nous apportent les équipes métier, indique la directrice. Le groupe a mis les moyens pour accompagner le développement de cette activité. » Il ne dévoile d’ailleurs pas d’informations chiffrées mais au vu de la stratégie engagée, on en déduit aisément que les résultats et la rentabilité sont bien présents.
D’ailleurs Alexandra Suire annonce d’ores et déjà qu’une nouvelle mouture de la plate-forme avec de nouvelles données et outils est dans les cartons. Fnac Darty ambitionne même de pouvoir intégrer dans ses analyses les autres médias traditionnels afin d’avoir une vision holistique des campagnes.