Comment préserver la motivation des commerciaux à l’heure de l’omnicanalité
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Repenser les schémas de rémunération variable des vendeurs s’impose avec l’omnicanal et l’évolution de leur rôles afin de préserver leur motivation. Voici les points clés à respecter selon Fabien Lucron, directeur du développement de Primeum.
Avec la crise, le retail a été frappé de plein fouet par les mesures sanitaires, et les changements de comportements ont été encore plus soudains. L’omnicanalité ne s’envisage plus dans un futur lointain, elle est plus que jamais d’actualité. Face à ces évolutions, il est impératif de repenser les schémas de rémunération variable des commerciaux afin de préserver leur motivation et récompenser les performances de chacun de façon équitable et pertinente.
L’acte de vente, résultat d’une série d’actions
Avec l’omnicanalité, l’achat d’un client n’est plus le résultat d’un acte isolé manifesté à travers un seul canal de communication mais plutôt le résultat d’une série d’interactions établies à travers différents canaux de vente : appel téléphonique, rendez-vous avec le commercial, demande de conseils en magasin, recherches sur le site internet de l’entreprise etc…
La relation client se construit alors autour d’un parcours fluide qui demande à l’entreprise de réussir à accompagner le client en passant d’un canal à l’autre sans que cela ne s’en ressente au niveau de l’expérience client. Les différents canaux deviennent interdépendants et, dans un tel contexte, définir la rémunération variable d’un seul commercial s’avère être une affaire complexe.
Comment rémunérer le succès d’une vente quand celle-ci aura peut-être été réalisée en faisant intervenir plusieurs acteurs aux rôles distincts ? Comment prendre en compte l’impact de l’omnicanalité sur les ventes et comment s’adapter pour permettre aux commerciaux de garder leur motivation intacte ?
Les pièges à éviter dans le plan de rémunération des commerciaux
- Limiter la rémunération du commercial aux actes de vente directs
Certaines entreprises considèrent que le commercial ne doit percevoir de rémunération variable que lorsqu’il est directement associé à la vente. C’est un choix qui permet de délimiter clairement les conditions d’attribution et facilite le calcul de la rémunération mais qui peut isoler le commercial et le mettre en compétition avec d’autres canaux de vente.
- Redéfinir la rémunération du commercial en cours de route
Parfois, pour équilibrer le phénomène d’omnicanalité, un commercial voit le pourcentage de rémunération qu’il avait négocié lors de son intégration dans l’entreprise baisser au profit d’un pourcentage de rémunération calculé sur un autre canal de vente. Quand cette réattribution représente un manque à gagner, le commercial peut y voir une volonté de l’entreprise de diminuer sa rémunération variable sans explication réelle et le vivre avec difficulté.
- Attendre du commercial qu’il réalise des ventes additionnelles pour compenser
Cet exemple a particulièrement pu s’exprimer ces derniers temps dans le retail avec la mise en place du « click and collect » : les clients effectuaient leurs achats en ligne et ne se rendaient en magasin que pour récupérer leur commande. Le vendeur sur site n’avait alors que la possibilité de proposer une vente additionnelle complémentaire pour générer du chiffre. C’est une opportunité pour l’enseigne mais cela peut se transformer en manque à gagner pour le vendeur si le click & collet ne rentre pas dans le CA magasin. Le choix de l’indicateur et de ses modalités de calculs sont essentiels pour que maillon de la chaîne joue pleinement son rôle.
- Rémunérer deux fois le même acte de vente
Certains systèmes de rétribution consistent parfois à récompenser deux fois le même acte de vente. C’est le cas par exemple quand une entreprise décide de rémunérer différents canaux de vente à partir d’un pourcentage du chiffre d’affaires pour chaque canal (magasin sur site et e-commerce par exemple). C’est un choix qui offre l’avantage de faciliter la collaboration entre les différents acteurs de la vente mais qui peut s’avérer coûteux.
- Quand on rémunère le commercial sur de nouveaux indicateurs de la relation client
Pour prendre en compte l’omnicanalité et renouveler les critères de rémunération des commerciaux, une entreprise peut décider de rémunérer un commercial non pas sur un acte de vente direct mais en fonction d’une étape clé de la relation client durant laquelle il aura exercé une plus grande influence. C’est par exemple le cas si un commercial identifie un besoin du client en amont de la vente, le conseille et que le client finalise ensuite l’acte de vente à travers un autre canal. Cette possibilité offre l’avantage de valoriser la performance du commercial même s’il n’a pas conclu la vente mais il faut disposer de moyens technologiques adaptés pour comptabiliser ces nouveaux indicateurs.
Il n’existe pas de solution parfaite, chaque entreprise doit définir pour ses commerciaux des critères de rémunération en adéquation avec la culture de l’entreprise et qui sont justes autant pour le commercial que pour l’entreprise.
Repenser la rémunération variable en intégrant des critères de satisfaction client dans une approche collective
- Considérer que l’influence du commercial est sous-jacente par défaut, quel que soit le canal de vente !
Dans ce cas, l’entreprise décide que la rémunération du commercial se compose par défaut d’un pourcentage calculé sur les ventes de son portefeuille client, qu’il soit intervenu ou non sur la vente. On attribue donc une partie de la rémunération variable non pas sur la performance individuelle du commercial mais sur la performance collective de l’entreprise.
- Favoriser la performance collective en rémunérant à partir du secteur géographique
Plutôt que de récompenser la performance individuelle de chaque commercial, on calcule la rémunération variable des commerciaux à travers la performance collective d’un même secteur géographique. Cette technique permet de créer une meilleure cohésion d’équipe et évite de mettre en concurrence les différents canaux de vente.
- Calculer la rémunération variable à partir des différents points d’entrée de la relation client avec un CRM adapté
Dans ce cas, il s’agit de réinventer la façon de calculer une rémunération variable. Plutôt que de se baser sur le nombre de ventes, on calcule la part variable sur les différents points d’entrée qui ont permis de concrétiser une vente. Pour que cela fonctionne, il est nécessaire de suivre la relation client en continu quel que soit le canal de vente avec un CRM qui centralise toutes les informations.
Ainsi, il est possible de prendre en compte de nouveaux indicateurs de rémunération variable comme l’engagement client ou la satisfaction client. Cela permet au commercial de ne pas se mettre en compétition avec d’autres canaux. S’il ne concrétise pas la vente finale, le travail qu’il a fait en amont est quand même valorisé, et le besoin client devient la priorité.
Si traditionnellement, la part variable reposait sur un système de commission à la vente, qui faisait la part belle au principe « plus je vends, plus je gagne », dans un retail désormais omnicanal, ce système de commission n’est plus suffisant pour motiver et récompenser équitablement les commerciaux. Or, la motivation est une force motrice pour le développement et la pérennité de l’entreprise. Il est donc impératif de trouver, en réponse à la stratégie de l’entreprise, de nouveaux critères de rémunération variable qui vont au-delà du CA effectué en magasin.
A propos de l’auteur :
Après 15 années consacrées au management et à l’efficacité commerciale et économique au sein de grands groupes essentiellement dans le secteur de la banque et de l’assurance, Fabien Lucron rejoint le cabinet Primeum et se consacre depuis plus de 10 ans à la création et la refonte de dispositifs de primes ainsi qu’à leur calcul et leur animation à l’aide de solution applicatives dédiées.