Débuts prometteurs pour le groupe Eram dans la seconde main
Par Dalila Bouaziz | Le | Seconde main
Cet article est référencé dans notre dossier : Economie circulaire : les initiatives des retailers & e-commerçants
Ce n’est pas un mais trois projets lancés simultanément par le groupe Eram dans la seconde main avec Claquettes Market : corners en boutiques, plateforme en ligne, chaussures reconditionnées. L’ambition n’est pas moins que de devenir la marketplace de chaussures de seconde vie.
Si les initiatives dans le marché de l’occasion se multiplient dans le textile, le secteur de la chaussure semble moins évident à développer : nombre de pointures plus importantes, déformation à l’usage, hygiène… Le défi n’a pourtant pas fait peur au groupe Eram qui a décidé en novembre dernier de lancer son service de seconde main, Claquettes Market. Pas un mais trois projets à la fois via une plateforme omnicanale : « En direct de notre atelier », « En direct de nos boutiques » et « En direct de votre dressing » !
Des corners dans 60 boutiques Eram et Bocage
Après avoir testé durant deux ans des initiatives de seconde main, le groupe Eram a ouvert 60 corners de chaussures d’occasion au sein de ses deux enseignes de centre-ville : Eram (40 points de vente) et Bocage (20 magasins), sur toute la France. « L’idée était de rajeunir notre clientèle âgée de 40 ans en moyenne, driver du trafic dans nos points de vente et nous positionner sur une mode plus durable et responsable, un enjeu important pour le groupe, explique Alexandra Gibou, responsable des projets Mode circulaire et durable. Mais aussi de permettre à notre clientèle de franchir le cap de la seconde main en leur proposant cette alternative. »
Déjà portées, ces paires sont hygiénisées et restaurées par les équipes en boutique, prises en photo dans les mini-studios installés dans les points de vente. Puis les annonces sont rédigées au nom de l’acheteur et mises en corner avec une PLV spécifique. Les chaussures (entre 20 et 30 paires par corner minimum et jusqu’à 100 maximum) peuvent être achetées en magasin ou en ligne. « Beaucoup de consommateurs en ont assez de passer du temps à publier des annonces, gérer les prix, les expéditions…, affirme Alexandra Gibou. Nous avons développé Claquettes Market avec notre offre phare ‘En direct des boutiques’. » Concrètement, le client ramène en magasin les paires de chaussures de n’importe quelle marque dont il veut se séparer pour les magasins Eram. Pour l’enseigne Bocage, les chaussures acceptées ne sont que celles de la marque. Le client se met d’accord sur un prix avec le conseiller. « Notre expérience nous permet de bien aiguiller les acheteurs sur les prix pratiqués pour que les chaussures partent », pointe-elle.
4 000 paires récupérées depuis janvier
Le groupe Eram ne paie le vendeur que si celle-ci est vendue en lui donnant un bon d’achat du montant de la vente (cumulable avec d’autres ventes) auquel il rajoute 30 % supplémentaire. « Le prix moyen d’une paire vendue oscille entre 20-25 euros. Le client peut cumuler plusieurs bons d’achat pour obtenir une belle cagnotte valable au sein des boutiques Eram, Bocage et Mellow Yellow avant de l’étendre potentiellement à d’autres enseignes », pointe la responsable des projets Mode circulaire et durable. Depuis janvier, le groupe Eram a ainsi récupéré 4 000 paires grâce à une communication dédiée : newsletters ciblées, influence, réseaux sociaux avec la mise en avant de chaque boutique…
« Au démarrage, l’engouement des consommateurs a un peu effrayé nos vendeurs qui voyaient certains clients apporter une valise de chaussures, indique Alexandra Gibou. Nous avons limité le dépôt à trois paires à la fois pour ne pas engorger le trafic en magasin et ne pas capter trop longtemps les conseillers. A l’origine, nous avions créé une grille de tarifs pour aider les vendeurs à se repérer. Grâce aux tests, ils se sont rôdés à cette nouvelle activité et devenus des experts dans la tarification. Chaque magasin s’adapte à sa clientèle pour fixer les prix. »
Un taux de revente de 65 %
Les chaussures récupérées peuvent être avoir été portées mais doivent rester en bon état, sans traces ni déformation. Au bout d’un mois, si les paires n’ont pas été vendues, un mail est envoyé pour inciter le vendeur à baisser son prix. « Nous nous sommes rendu compte que toutes les paires où les clients ont insisté pour augmenter le prix préconisé, celles-ci partent beaucoup moins bien », observe-t-elle. En moyenne, elles restent moins de deux mois. Le taux de revente est de 65 %. « La clientèle d’Eram recherchent des petits prix et la bonne affaire là où celle de Bocage est plus sensible au discours de durabilité, circularité et responsabilité », pointe-elle.
Si au bout d’une saison (quatre mois), les chaussures sont encore en magasin, le client peut les récupérer sinon elles sont données à l’association Emmaüs.
« En direct de votre dressing », l’offre version Vinted du groupe Eram
Autre initiative, l’offre C to C du groupe Eram. Parfois neuves ou déjà portées, les paires sont mises en vente par les membres de la communauté. Chaque membre décide de mettre en ligne sa paire au prix qu’il souhaite et s’occupe ensuite de l’envoi. « Nous la proposons d’un point de vue client avec un système très classique où nous sommes juste intermédiaires entre l’acheteur et le vendeur. Cette offre ne fonctionne pas très bien parce qu’aujourd’hui vous avez des acteurs en ligne spécialisés sur la seconde main. »
Le groupe Eram a également un intérêt moindre à la pousser puisque cela ne lui apporte ni commission ni génération de trafic en point de vente.
Les invendus de l’usine « La Manufacture » reconditionnés
Forts de l’héritage du groupe depuis 1927, les artisans chausseurs de la Manufacture d’Eram (Montjean-sur-Loire) reconditionnent les paires délaissées en raison de petits défauts : chaussure d’exposition décolorée, bride cassée lors de l’essayage… Elles sont vendues 45 euros en moyenne.
« Nous avons monté cinq petits ateliers de réparation pour les chaussures Bocage, Eram, TBS, Mellow Yellow, Faguo et les Tropéziennes, détaille Alexandra Gibou. Cela fonctionne très bien et nous avons déjà reconditionné 17 000 paires depuis le début de l’année. Cet été, sur les 12 000 paires mises en ligne (mais aussi dans 20 corners en point de vente) 70 % ont été vendues à ce stade. Un chiffre très satisfaisant pour un démarrage. »
Le lancement correspond à une période de baisse du pouvoir d’achat et de forte inflation, les petits prix et la seconde main prennent de l’ampleur favorisant ces achats.
Devenir la marketplace de chaussures de seconde vie
« Nous nous laissons deux ans pour expérimenter les trois initiatives. Parmi les évolutions prochaines, nous allons regrouper les chaussures par pointure, précise Alexandra Gibou. Les clients recherchent en grande majorité par ce prisme surtout pour de la seconde main. Début 2024, nous allons discuter avec des marques externes pour les entrer sur notre site en récupérant leurs stocks. Nous les reconditionnerons avec l’objectif de devenir la marketplace de chaussures de seconde vie. »