Laura Toledano (Zalando France) : « Nos retours sont gratuits et ils le resteront »
Par Clotilde Chenevoy | Le | Livraison
Rendre payant le retour des produits chez Zalando n’est pas d’actualité. Le pure player mise toujours sur les services pour se développer et il a d’autres solutions pour baisser les retours, surtout tech, selon Laura Toledano, la directrice générale. Explications.
Zara a décidé de rendre les retours via les points de vente payants, à raison de 1,95 euros. Qu’en est-il chez Zalando ?
Le retour des produits est gratuit et cela ne va pas changer. Avec « Essayez d’abord, Payez après », nous offrons aux clients la possibilité d’essayer sans contrainte. Cela fait partie de notre positionnement et cela participe à protéger leur trésorerie dans le contexte actuel. Bien évidemment nous restons attentifs au marché, mais si nous devons faire des économies, ce n’est pas sur ce sujet que nous irions en chercher.
Par ailleurs, nous cherchons déjà à limiter les retours lié à la taille des articles, en misant sur la technologie. Cela concerne un tiers des cas. Ainsi, pour guider les clients dans l’achat de baskets, nous leur indiquons s’il faut prendre une taille plus petite ou plus grande, en fonction de toutes les données que nous avons recueillies. Avec cette précision, nous avons gagné 10 points sur nos retours.
Avec les données que nous collectons, nous pouvons indiquer si une marque taille petit ou grand. Préciser ce point à nos clients nous a permis de gagner 10 points sur nos retours.
Nous proposons également aux clients d’ajouter dans leur compte client leurs tailles et leurs marques pour affiner le choix des produits. Et prochainement, nous allons ajouter un service de body scanning. Il permettra d’intégrer des clichés de ses mensurations pour mieux choisir les tailles mais aussi pour mieux se projeter avec les articles identifiés. Cela va renforcer notre rôle de curateur et nous permettre d’affiner la proposition des silhouettes.
Comment se porte Zalando sur le premier trimestre ? Quels sont vos enjeux ?
Après la forte croissance de l’année dernière, le premier trimestre a été influencé par des facteurs macroéconomiques. Au 1er trimestre 2022, le volume d’affaires a légèrement augmenté de 1 % pour atteindre 3,2 milliards d’euros. Le contexte n’est pas simple après deux ans de pandémie et il est devenu très volatil. Nos enjeux restent pour la France de travailler sur nos assortiments, d’accompagner nos partenaires face aux défis que le secteur rencontre et de maintenir la qualité de service.
Zalando doit être un site français, tout en apportant une touche européenne avec des marques désirables qui renforcent l’attractivité de l’offre.
Pour limiter les soucis d’approvisionnement, notamment dans la basket et les articles de sport, nous travaillons avec nos partenaires pour trouver des solutions avec la mise en place de rétroplanning et de plans d’actions. Nous sécurisons également des volumes en achetant du stock pour nos produits essentiels. Nous avons 49 millions de clients actifs, ce qui nous permet de peser dans les discussions également. Notre stock est géré au niveau Europe. Je vais apporter la connaissance du marché et des informations sur comment activer la marque sur celui-ci. Cela passe par la création de collections capsules ou d’exclusivité. Zalando doit être un site français, tout en apportant une touche européenne avec des marques désirables qui renforcent l’attractivité de l’offre.
Dans cette optique, vous avez d’ailleurs déployé une stratégie spécifique avec les influenceurs. Pouvez-vous revenir sur ce projet ?
En effet fin 2021, nous avons commencé à travailler avec des influenceurs pour qu’ils composent des looks avec des articles disponibles sur Zalando. Ces derniers sont ensuite présentés sur le site et le client peut les ajouter en un clic dans son panier. Nous réalisons en parallèle tout un travail sur notre donnée pour pousser le bon influenceur aux clients. Notre objectif est de multiplier les collaborations pour proposer un maximum de diversité dans les looks. Pour cela, nous ciblons aussi différents profils d’influenceurs pour avoir un panel très large.
Le groupe a annoncé son souhait de pousser le curseur vers la marketplace. Quel est votre positionnement in fine ?
Actuellement la marketplace et connected retail pèsent 32 % des volumes et nous visons d’ici 2025 d’atteindre 50 %.
On oppose souvent marketplace et retailer mais notre objectif est surtout d’être le référent de la mode, au même titre que Netflix l’est pour le streaming vidéo ! Avec ce positionnement, l’offre se révèle capital et nous sommes agnostiques de tout canal. Nous avons des ventes en wholesale, provenant de la marketplace ou encore du connected retail, soit la mise en ligne de stock de magasins physiques. Et à ces trois modèles s’ajoutent le déstockage. Actuellement la marketplace et connected retail pèsent 32 % des volumes et nous visons d’ici 2025 d’atteindre 50 %.
Plus de six mois après le lancement du service Zalando Plus, quel bilan faites-vous ?
Nous sommes ravis de ce lancement qui a été fait en novembre dernier. Le service, qui a pour objectif de fidéliser le client avec un service de livraison gratuit, a fédéré 1 million de clients en Europe en quelques mois. Au-delà de la logistique, les clients ayant souscrit au service accèdent aussi à des collections capsules ou une ligne spécifique pour le service client. Nous avons vocation a encore étoffer les avantages de Zalando Plus. Par exemple, nous suivons de près ce qui se fait dans le Web3. C’est encore très prospectif mais déjà on s’interroge sur ce que nous pourrions apporter à nos clients.
Les études avancent que les clients sont demandeurs de produits plus éco-responsables. Est-ce que vous le constatez ? Avez-vous adapté votre offre en conséquence ?
Un client sur deux qui a acheté un produit éco-responsable. Cette proportion atteint même 60 % sur 2022.
Depuis bientôt 3 ans, nous avons lancé le programme Do More. Nous savons que l’industrie du textile est l’une des plus polluantes mais nous voulons faire partie de la solution. Nous continuons d’augmenter la part de produits éco-responsables. Ils représentaient 16 % de l’offre en 2020, 21,4 % en 2021 et nous souhaitons atteindre 25 % d’ici 2023. Au-delà d’étoffer le catalogue, nous cherchons aussi à rendre plus visible ces produits pour les internautes, par exemple avec un tag spécifique. Nous constatons une vraie demande, avec un client sur deux qui a acheté un produit éco-responsable. Cette proportion atteint même 60 % sur 2022.
Cela inclut aussi des articles de seconde main ?
En effet. Nous proposons ce service depuis 2021. Nous avons commencé avec 20 000 articles et nous atteignons désormais 400 000 pièces. Nous sommes sur un modèle de C to B to C. Initialement, nous sourcions les articles auprès de nos clients et des professionnels. Nous avons arrêté le service de collecte auprès des particuliers pour des raisons de rentabilité et d’organisation cohérente. Les clients reçoivent ensuite un bon d’achat, utilisable pour du neuf de la seconde main, ou faire le choix de faire don du montant à une association partenaire. Nous sommes actuellement en phase de consolidation.
Une offre beauté est venue s’ajouter au textile. Les ventes sont-elles au rendez-vous ?
C’est un gros axe de développement pour nous car c’est très complémentaire à la mode. Il est pertinent de proposer un rouge à lèvres assorti à une robe. Nous avons aujourd’hui de jolies marques et un bel assortiment. Sephora travaille avec nous en Allemagne et les ventes sont au rendez-vous. Nous avons toutefois des ajustements à réaliser en matière d’expérience utilisateur. Des investissements dans la technologie ont été réalisés pour améliorer la présentation des produits. C’est également une nouvelle organisation à mettre en place d’un point de vue logistique.
Comment s’organise d’ailleurs votre logistique aujourd’hui ?
Nous disposons d’un entrepôt de à Moissy-Cramayel (77) et un second est en cours de construction à quelques kilomètres, à Montereau-sur-le-Jard (77). D’une surface de 140 000 m², il sera entièrement automatisé. Il devrait entrer en service en 2023 pour être pleinement opérationnel d’ici 2025, pour servir la France et certainement l’Europe du Sud. Ce nouveau site sera l’un des plus gros d’Europe et nous permettra d’aller plus loin dans le service et d’innover dans la technologie et la logistique.
Qu’en est-il de votre rentabilité ?
Nous ne communiquons pas de chiffres France mais au global Zalando est rentable. En 2021, Zalando a réalisé un EBIT ajusté de 468,4 millions d’euros. Nos prévisions à moyen terme reflètent la poursuite d’une croissance forte et rentable de l’ordre de 3 à 6 % de l’EBIT ajusté jusqu’en 2025. La force du groupe est d’avoir compris que la technologie et la logistique sont tout aussi importantes que l’offre. Depuis 2013, ce triptyque est au cœur du développement de Zalando.
Les chiffres de Zalando au premier trimestre
• Volume d’affaires (GMV) de 3,2 milliards d’euros (+1 %) au premier trimestre
• Chiffre d’affaires de 2,2 milliards d’euros (-1,5 % YoY), EBIT ajusté de -51,8 millions d’euros.
• Les clients actifs de Zalando ont augmenté de 5,2 % au premier trimestre (17 % sur 12 mois), atteignant près de 49 millions, et les adhésions à Zalando Plus ont augmenté de 150 % par rapport à l’année dernière.
• La part des activités partenaires a connu une forte croissance au premier trimestre, représentant 32 % du volume d’affaires (GMV). Objectif à terme d’atteindre 50 % du volume d’affaires.