Stratégie retail

Les 5 annonces stratégiques du plan de transformation de Maisons du Monde

Par Dalila Bouaziz | Le | Enseignes

Après une nouvelle année décevante, Maisons du Monde dévoile son nouveau plan stratégique pour 2024-26. Entretiens avec François-Melchior de Polignac, directeur général, et Guillaume Lesouef, directeur exécutif marketing, offre et engagement qui détaillent à Républik Retail le programme de relance.

François-Melchior de Polignac, DG (à gauche), Guillaume Lesouef, directeur exécutif marketing. - © D.R.
François-Melchior de Polignac, DG (à gauche), Guillaume Lesouef, directeur exécutif marketing. - © D.R.

Maisons du Monde affiche un chiffre d’affaires en baisse de 9,3 % en 2023, à 1,13 milliard d’euros, avec un recul de 6,2 % en France et de près de 13 % à l’international. Les ventes des articles de décoration sont en chute de 10 %, un poids important pour Maisons du Monde qui réalise 58 % de son chiffre d’affaires sur cette catégorie. Le mobilier (42 % de ses ventes) est aussi en baisse à -8,4 %.

« Nous avons atterri financièrement de manière saine avec un cash-flow quasiment identique à l’année d’avant -malgré les difficultés de chiffres-, en diminuant notre dette nette, argumente François-Melchior de Polignac, directeur général de Maisons du Monde. Nous avons resigné nos engagements de crédit auprès de nos banques depuis quelques mois. Nous avons un bon terrain de jeu financier pour réaliser un programme de transformation majeure. » Baptisé ‘Inspire Everyday’, ce plan d’action concerne l’ensemble du modèle commercial : offre, expérience en magasin, prix, merchandising… Une restructuration majeure à horizon trois ans avec une prévision de « retour à la croissance pour 2025-26 ».

Rationaliser l’offre mais aussi développer certaines catégories

« L’enjeu, c’est de travailler déjà le produit en tant que tel, avec la conviction forte qu’on a et qui est fondée non pas sur des études théoriques mais sur les retours de nos clients : nous pouvons faire plus avec moins de références », pointe François-Melchior de Polignac. Concrètement, l’enseigne d’ameublement et de décoration va diminuer de 25 % le nombre de références, en retravaillant son offre pour « s’assurer qu’elle soit encore plus inspirante, durable et accessible ». « Dans cette période de forte inflation, nous avions augmenté nos prix de manière sans doute un peu trop forte et brutale. Nous voulons revenir à nos fondamentaux où chacun peut se faire plaisir en venant chez Maisons du Monde », souligne le directeur général.

En moyenne, une collection (printemps-été / automne-hiver) recense un peu plus de 10 000 références. Parmi les catégories où l’enseigne veut diminuer son offre celles autour du mobilier pour enfants. Autre exemple, sur les coussins. « Nous comptons aujourd’hui 700 références de coussins, détaille Guillaume Lesouef, nouveau directeur exécutif marketing, offre et engagement de Maisons du Monde. Trop de choix tue le choix ! L’enjeu sera de baisser de 40 % l’assortiment. Cette réduction permettra d'être plus pertinent sur les collections sélectionnées et de mieux les merchandiser. Nous sommes convaincus que l’offre et le concept ne doivent faire qu’un pour être parfaitement cohérent vis-à-vis de nos clients. » Un travail de rationalisation catégorie par catégorie pour une plus grande visibilité de l’offre en magasins.

D’autres segments vont au contraire augmenter pour répondre aux besoins exprimés par les clients « pas suffisamment pris en compte ». Le linge de maison au sens large (incluant le linge de bain, de cuisine, de lit), les accessoires y compris culinaires et de bain seront renforcés. « Près de 80 % des clients interrogés ont exprimé des attentes sur ces catégories où ils nous considèrent légitimes », explique Guillaume Lesouef. A noter aussi le retour du catalogue depuis la fin d’année dernière, « premier outil d’accès à l’inspiration de la marque pour les clients ».

Renforcement de l’accessibilité prix

Depuis plus d’un an et demi, Maisons du Monde procède à des baisses de prix, notamment sur les produits essentiels, dits permanents. « Ces dernières années, nous avons connu de vraies baisses de volumes sur les produits d’entrée de gamme, ce qui n’a pas été le cas pour les articles plus haut de gamme et inspirants », souligne François-Melchior de Polignac. Au total, 2 237 articles ont connu des diminutions de prix avec une baisse de 12 % en moyenne (10 % pour les meubles et 13-14 % pour la décoration). « Notre enseigne reste sur un positionnement mass market où 70 % du chiffre d’affaires en magasins s’effectue en ZAC », précise le dirigeant. Une double baisse de prix pour répondre à cette notion d’accessibilité. « La démarche se veut plus pyramidale : recruter davantage de clients via des produits signature et fidéliser davantage à travers les essentiels », rajoute Guillaume Lesouef. Les premiers résultats semblent confirmer ce choix.

Maisons du Monde va également réduire de moitié le nombre de ses fournisseurs : de 1 600 à 800. « Notre nombre de références et nos volumes d’achat étaient très éclatés et morcelés avec un nombre trop important de fournisseurs pour être réellement efficaces », indique le dirigeant.

Diminuer la promotion et créer un programme de fidélité plus généreux

L’enseigne souhaite réduire progressivement la promotion par rapport à 2023 qui était « un pic ». En France, un programme de fidélité sera lancé en septembre pour « redonner de la générosité prix envers les clients les plus attachés à la marque ».

« L’actuel programme privilège est complètement décorrélé du statut et de la valeur des clients, explique le directeur exécutif marketing, offre et engagement de Maisons du Monde. L’idée est de travailler un programme qui soit avec une proposition de valeur claire par client, aussi bien transactionnelle que relationnelle, émotionnelle et servicielle pour nourrir la marque. »

40 à 50 magasins fermés ou transférés et accélération de la franchise

Dans l’ensemble de ses pays, Maisons du Monde recense un parc magasins de 340 magasins (plus de 200 en France). Le dirigeant indique « 40 à 50 fermetures ou transferts de magasins dans les trois prochaines années » en France et Europe. « Nous disposons d’un potentiel d’expansion sur nos territoires mais aussi sur des nouveaux, détaille-t-il. Nous ciblons les 400 points de vente d’ici 2026 donc il y aura à la fois des ouvertures, notamment dans les zones de type ZAC, une clientèle de destination et un modèle plus résilient, mais aussi des assainissements du parc. » Les ouvertures seront notamment portées par la franchise ou l’affiliation, avec un objectif de 30 % du réseau d’ici 2026. A date, neuf magasins sont sur ces modèles.  

L’enseigne expérimente ainsi un nouveau merchandising selon ses zones de chalandise (centre-ville ou zones d’activité) « avec toujours plus d’inspiration de produits » pour plus de facilités de repérage dans les magasins. Maisons du Monde teste des regroupements partiels de catégories.

La seconde main sur le digital

Autre axe, après le lancement l’année dernière de « Seconde Chance » en magasins, ses produits d’occasion, Maisons du Monde lancera le service sur le digital en septembre prochain pour qu’il devienne omnicanal. « Sur Leboncoin, 10 millions d’annonces sont faites sur nos produits chaque année, argumente Guillaume Lesouef. Ils ont une vraie valeur par rapport à d’autres enseignes où il est plus compliqué de démonter et remonter une armoire par exemple. » Le marché de seconde main dans la catégorie Meubles représente plus d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires. Une demande forte et où le prix de vente moyen est aussi beaucoup plus élevé. « C’est essentiellement pour nous un enjeu d’accessibilité et de durabilité, explique le directeur général. Nous ne pensons pas que le modèle aura pas une énorme profitabilité mais on sait que le potentiel à moyen-long terme sera considérable. » L’enseigne dispose aussi d’un pôle de réparation pour aider dans cette durabilité des produits.

Au global, ce plan d’action doit permettre à Maisons du Monde de réaliser 85 millions d’euros d’économies en trois ans pour réinvestir dans cette transformation et générer un « cash-flow de plus de 100 millions d’euros ».